La grotte Sainte-Reine ou trou de Sainte-Reine est une grotte classée pour son gisement archéologique, située sur la commune de Pierre-la-Treiche, en rive droite de la Moselle. C'est la deuxième plus grande cavité naturelle du département de Meurthe-et-Moselle pour ce qui est du développement connu[1].
Cette grotte, composée de plusieurs entrées classées sous le nom générique de « grottes dites Trou de Sainte-Reine », faisait partie initialement d'un endokarst situé sous le fond de la vallée de la Moselle ; cet endokarst a été recoupé lorsque la rivière s'est encaissée. Avant sa capture par la Meurthe, la Moselle a participé à la création et à l'élargissement de l'ensemble des grottes puis à leur comblement avec ses alluvions.
À la suite de la découverte d'ossements d'animaux préhistoriques et de pièces manufacturées, la cavité a été classée aux monuments historiques par un arrêté daté du [2].
Historique
Cette cavité devrait son nom à une femme de chef (une « sainte reine ») de l'époque celte, gallo-romaine ou franque qui, étant morte, y aurait été cachée pour la soustraire à l'ennemi[3].
Cette cavité est connue au moins depuis le XVIIIe siècle, puisque le grand porche (ou portique) était occupé par un ermitage[4] puis un fabricant de patins vers la fin du siècle[5].
C'est néanmoins à partir de la seconde moitié du XIXe siècle que son exploration commence, notamment avec les prélèvements d'ossements par Moreau[notes 1], comme une portion de mâchoire d'ours des cavernes[6],[7]. Nicolas Husson (°1814 - †1890), pharmacien de Toul, aidé de son fils Camille (°1843 - †1886), entreprennent son exploration systématique. Ils ébauchent un premier plan en 1863 puis un nouveau, plus complet, en 1864. Dans le sol de la salle du Chapeau de Napoléon et les débuts de la galeries de l'Ouest et de la galerie Transversale, Nicolas Husson trouve des ossements d'animaux dont mâchoires, fémurs, humérus, cubitus, côtes... d'ours des cavernes, dents et débris d'ossements de hyène des cavernes, etc.[8] examinés par Dominique Alexandre Godron, doyen de la faculté des sciences de Nancy, et Paul Gervais, doyen de la faculté des sciences de Montpellier[9], puis des ossements humains et des pièces manufacturées (silex taillés, amulette en bois de cerf ou de renne, vase en verre bleu émaillé d'époque romaine, etc. au niveau du labyrinthe et du portique[10]). Dans le même temps, MM. Gaiffe et Benoît fils s'intéressent à la grotte, s'aventurent dans la galerie de l'Est et y prélèvent divers ossements[11].
À la fin du XIXe siècle les travaux sont repris par de nouveaux explorateurs, Ernest Brésillon et Charles Deschamps, qui effectuent d'importants travaux de désobstruction et publient un nouveau plan en 1891[12], plan repris par Édouard-Alfred Martel en 1894 dans Les abîmes en page 413. Dans la première moitié du XXe siècle ils sont suivis par Restiaux, Jean Bourgogne, Christian Chambosse puis Robert Chevallereau et Jean Colin[13].
En 2004, le développement total s'élève à 1 260 mètres pour un dénivelé de 17 mètres[14].
David Parrot et l'USAN y ouvrent en octobre 2008 une nouvelle galerie qu'ils baptisent la Salle 33[15].
Entre 2016 et 2020 Olivier Gradot, Théo Prévot et d'autres membres de l'USAN y désobstruent une galerie baptisée la galerie Rat-Lynx et démontrent l'existence de galeries tridimensionnelles[16],[17].
Dans le cadre des recherches de sa thèse, Benoît Losson est amené, à la fin des années 1990, à y prélever des matériaux pour établir des datations en lien avec la capture de la Moselle et l'influence de l'endokarst de Pierre-la-Treiche dans cette capture. Ses travaux conduisent à une datation des grottes de Pierre-la-Treiche antérieure à 300 000 ans[18].
Le Bruno Condé (°1920 - †2004) et B. Brutel découvrent des diplourescampodéidés dans l'extrémité sud de la galerie des Merveilles[21]. L'eau stagnante de la salle de l'Écho est peuplée de crustacés isopodes du genre Cæcosphæroma burgundum, Dollfus, 1898[22]. De plus, ils y prélèvent des ostracodesSphæromicola topsenti, Paris, 1916[23]. D'après le professeur J.-P. Henry, la présence de Cæcosphæroma est accidentelle, certainement due à une forte pluviométrie au printemps 1949[24].
En 2020, Olivier Gradot et Théo Prévot repèrent Androniscus dentiger entre la salle aux 3 issues et la galerie transversale, ce qui est une redécouverte 60 ans après une observation de J.-P. Henry en 1959 dans la galerie de l'Est[25].
(1932) - « Les grottes de Sainte Reine », L'avenir toulois 17e année 1re partie no 781 () p. 1, 2e partie no 782 () p. 1, 3e partie no 783 () p. 1, 4e partie no 784 () p. 1, 5e partie no 786 () p. 1, 6e partie no 789 () p. 1, journal hebdomadaire, Impr. moderne, Toul
(1935) - « Les grottes de Sainte-Reine à Pierre-la-Treiche », Toul, publicité et tourisme no 2, Impr. touloise, Toul, p. 1-2
(1936) - « Excursion à Pierre-la-Treiche », Toul, publicité et tourisme no 12-13, Impr. touloise, Toul, p. 13-15
Gamez, P., Losson, B. (1998) - « Premiers résultats de l'étude des remplissages dans le karst de Pierre-la-Treiche (54). L'entrée E du réseau Sainte-Reine », Mosella, tome XXIII, no 3-4, Presses universitaires de Metz, Metz, p. 41-59
Hamon, B. (2017) – « Pierre-la-Treiche (54). Grotte Sainte-Reine. La station de Cæcosphæroma burgundum : les historiques », Scories Spécial Biospéologie, no 483, CPEPESC nationale, Besançon, p. 2-3
(1863) - « Cavernes à ossements - Trous de Sainte-Reine », Notes pour servir aux recherches relatives à l'époque de l'apparition de l'Homme sur la Terre et importance d'un air abondant et pur, Impr. A. Bastien, Toul, p. 13-19
(1865) - « Trou de Sainte-Reine », Journal de la Société d'archéologie lorraine et du Comité du Musée lorrain 14e année no 1, Société d'archéologie lorraine, Nancy, p. 7-10, 19-21, 146-147
(1865) - Alluvions des environs de Toul par rapport à l'antiquité de l'espèce humaine, Impr. A. Bastien, Toul, 16 p.
(1865) - Ancienneté de l'Homme dans les environs de Toul, Impr. A. Bastien, Toul, 8 p.
(1866) - Origine de l'espèce humaine dans les environs de Toul et figurines des temps primitifs, Impr. A. Bastien, Toul, 16 p.
(1867) - Origine de l'espèce humaine dans les environs de Toul - Analyse chimique et examen comparatif des épaves touloises avec celles du musée impérial de Saint-Germain et de l'Exposition universelle, Impr. A. Bastien, Toul, 30 p.
Louis, M. & Lehmuller, D. (1966) - Travaux et recherches spéléologiques tome III - "Contribution à l'avancement du catalogue des cavités de Meurthe-et-Moselle", USAN et A.S.H.M., Nancy, vol. 1 p. 91-93 + planches 26E et 26F dans vol. 2
Remy, P. (1932) - « Contribution à l'étude de la faune cavernicole de Lorraine : les grottes de Sainte-Reine », Bulletin de la Société d'histoire naturelle de la Moselle tome XXXIII, Société d'histoire naturelle de la Moselle, Metz, p. 55-71
Riston, V. (1892) – « Les grottes de Sainte-Reine », Revue de la section vosgienne du Club alpin français no 10, CAF de Nancy, Nancy, p. 70-83
Notes et références
Notes
↑Moreau était juge au tribunal civil de Saint-Mihiel et membre correspondant de la Société philomathique de Verdun à partir de 1835 (Mémoires de la Société philomathique de Verdun, tome premier, p. 11).
↑Remy, P. (1932) - « Contribution à l'étude de la faune cavernicole de Lorraine. Les grottes de Sainte-Reine », Bulletin de la Société d'histoire naturelle de la Moselle tome XXXIII, Société d'histoire naturelle de la Moselle, p. 55-71
↑Dumont, F. (1962) - « Activités dans l'Est - Calendrier U.S.A.N. », Travaux et recherches spéléologiques tome I, USAN, Nancy, 7 p.
↑Hamon, B. (2017) - « Les Ostracodes cavernicoles (Crustacea) observés en Lorraine (1940-2017) », Spéléo L no 26 (ISSN0758-3974), Ligue spéléologique lorraine, Tomblaine, p. 5-18
↑Hamon, B. (2017) - « Pierre-la-Treiche (54), Grotte Sainte-Reine. La station de Cæcosphæroma burgundum : les historiques », Le P'tit Usania no 229 (ISSN1292-5950), USAN, Nancy, p. 5-6
↑Prévot, Th. (2020) - « Un « trogloxène » repéré à Sainte-Reine », Le P'tit Usania no 261, USAN, Nancy, p. 6
↑Prévot, Chr. (2019) - « Faune cavernicole : observation de papillons à Pierre-la-Treiche », Le P'tit Usania no 246 (ISSN1292-5950), USAN, Nancy, p. 1