Fondée en 952, l'abbaye devient sous l'abbatiat de Richard de Saint-Vanne, un foyer de la réforme monastique du XIe siècle en Lorraine. Au XVIIe siècle, le prieur Didier de La Cour est à l'initiative d'une nouvelle réforme qui mène à la création de la congrégation de Saint-Vanne et Saint-Hydulphe qui comptera jusqu'à une cinquantaine d'abbayes. Après la Révolution, l'abbaye se voit abandonnée en 1792. Au XIXe siècle, elle est partiellement détruite, et il ne subsiste que quelques vestiges dont la tour Nord.
La tour Saint-Vanne est classée aux monuments historiques depuis le .
Histoire
Fondation et première réforme (Xe – XVIe siècle)
La première église Saint-Pierre-Saint-Vanne a probablement été construite par saint Vanne, 8eévêque de Verdun, qui y a été certainement inhumé. L'église est nommée dans le testament du diacre Adalgisel-Grimo, en 634. Elle avait pour fonction de garder les tombes des premiers évêques car aucun évêque de Verdun n'a été inhumé dans la cathédrale avant le Xe siècle. L'évêque Hatton (†870) y a élevé les reliques de l'évêque Vanne. Son successeur, Bérard (†879) y a installé des chanoines auxquels il a confié des biens appartenant à la cathédrale. C'est l'évêque Bérenger qui a remplacé les chanoines par des moines venant de l'abbaye Saint-Clément de Metz[1].
L'abbaye Saint-Vanne est fondée en 952 par l'évêque Bérenger qui impose la règle bénédictine. Elle est édifiée sur le site du premier oratoire chrétien, dédié à saint Pierre et saint Paul, et construit au IVe siècle par le premier évêque de Verdun, saint Saintin. L'abbaye porte le nom de saint Vanne, huitième évêque de Verdun[2],[3],[4].
Richard de Saint-Vanne, ancien chanoine de la cathédrale de Reims et abbé de Saint-Vanne de 1004 à 1046, fait de l'abbaye un foyer de réforme qui touche au-delà de la Lorraine. Il restaure le temporel et le spirituel[5], en rétablissant une discipline, en réhabilitant un cadre institutionnel et en redressant l'économie monastique. L'abbaye est alors dotée d'un scriptorium bien équipé[6].
Au XIIe siècle, l'abbaye se dote d'une église romane avec deux tours occidentales[3].
Au XIVe siècle, l'abbaye fait face à de graves difficultés financières comme d'autres communautés religieuses. Les derniers abbés ont dilapidé l'argent de l'abbaye, et Gérard de Vadenay, abbé de 1353 à 1381, va jusqu'à hypothéquer les titres de propriété. Le nombre de moines n'est alors plus que de cinq à six. Au XVe siècle, l'abbaye retrouve peu à peu de sa superbe[7].
Aux XVe et XVIe siècles, une nefgothique est accolée aux deux tours romanes[3].
La réforme de Didier de La Cour (XVIe – XVIIe siècle)
À la fin du XVIe siècle, la mense de Saint-Vanne est unie à lamense épiscopale. Ainsi à partir de Nicolas Psaume, l'abbé de Saint-Vanne est l'évêque de Verdun[8]. En 1598, l'évêque Éric de Lorraine demande aux moines d'élire un prieur régulier. Ils choisissent dom Didier de La Cour[9]. Ce dernier cherche à réformer les abbayes des environs selon l'esprit du concile de Trente (1545-1563) mais fait face à l'opposition de plusieurs religieux. À son initiative, le , l'abbaye Saint-Vanne de Verdun s'unit à l'abbaye Saint-Hydulph de Moyenmoutier pour former une nouvelle famille monastique[10].
À partir de 1630, l'abbaye se retrouve englobée dans l'enceinte de la citadelle de Verdun[5].
Abandon depuis la Révolution (depuis XVIIIe siècle)
La Révolution de 1789 mène à la déchristianisation de la France et donc de la ville de Verdun. En , l'abbaye de Saint-Vanne est saccagée par des volontaires de Mayenne-et-Loire à la suite de la prise de Longwy par l'armée prussienne[11]. La congrégation de Saint-Vanne et Saint-Hydulphe se voit supprimée[9], l'abbaye est fermée et devient une caserne laissée à l'abandon[4].
En 1838, faute de moyens financiers pour la restaurer, elle est en grande partie rasée sur les recommandations du génie militaire. Après le bombardement des ruines lors de la guerre de 1870, il ne reste plus que la tour Nord du XIIe siècle, des vestiges de l'ancien cloître du XIIIe siècle et le cellier des moines en sous-sol[4].
En 2009, l'armée cède le terrain de la citadelle à la ville de Verdun, après plusieurs centaines d'années d'occupation militaire. Dès l'année suivante, un conseil scientifique est créé pour mener une étude historique du site. En 2012, des premières fouilles archéologiques sont menées sur le site de l'ancienne abbaye de Saint-Vanne. Le projet archéologique est un chantier-école impliquant des étudiants de l'université de Lorraine et des chercheurs du CNRS et de l'INRAP, avec le soutien de la DRAC, de la MSH et du conseil départemental de la Meuse. Des éléments architecturaux ont été mis au jour ainsi que des sarcophages du VIe et VIIe siècles[4],[13].
Architecture
La première église avec ses deux tours est construite au XIIe siècle dans le style roman. Une nefgothique est accolée aux deux tours aux XVe et XVIe siècles[3]. L'édifice est une église-halle, avec les collatéraux de la même hauteur que la nef, permettant à de hautes fenêtres d'éclairer l'intérieur de l'édifice[5].
De cet édifice, il ne reste plus que la tour Nord ornée de chapiteaux[5]. Il y a également des vestiges de l'ancien cloître du XIIIe siècle et le cellier des moines en sous-sol[4]. La porte de l'ancienne abbaye a été préservée[3].
Liste des ecclésiastiques
Abbés
De 952 à 1508, quarante-cinq abbés se succèdent à la direction de l'abbaye Saint-Vanne. Le plus illustre est Richard de Saint-Vanne, qui fut abbé de 1004 à 1046.
↑Alain Girardot (dir.) et al., Histoire de Verdun, Metz, Éditions Serpenoise, , 205 p. (ISBN2-87692-263-0, BNF36200908), p. 149.
↑ abcd et eJean-Luc Flohic (direction) et al., Les patrimoines des communes de la Meuse, t. 2, Paris, Flohic Éditions, coll. « Les patrimoines des communes de France », , 608 p. (ISBN2-84234-0744, BNF37193403), « Verdun », p. 1122
↑ abc et dAlain Girardot (dir.) et al., Histoire de Verdun, Metz, Éditions Serpenoise, , 205 p. (ISBN2-87692-263-0, BNF36200908), p. 17-18.
↑Steven Vanderputten, « Identité collective et mémoire des réformes « richardiennes » dans l'historiographie bénédictine en Basse-Lotharingie et au Nord-Est de la France (XIe et XIIe siècles) », Le Moyen Age, De Boeck Supérieur, vol. CXVII, , p. 259-289 (lire en ligne).
↑ abcd et eAlain Girardot (dir.) et al., Histoire de Verdun, Metz, Éditions Serpenoise, , 205 p. (ISBN2-87692-263-0, BNF36200908), p. 52.
↑ a et bAlain Girardot (dir.) et al., Histoire de Verdun, Metz, Éditions Serpenoise, , 205 p. (ISBN2-87692-263-0, BNF36200908), p. 110.
↑ a et bGérard Michaux, « Une fondation tridentine : la congrégation bénédictine de Saint-Vanne », Revue d'histoire de l'Église de France, vol. 75, no 194, , p. 137-148 (lire en ligne).
↑Alain Girardot (dir.) et al., Histoire de Verdun, Metz, Éditions Serpenoise, , 205 p. (ISBN2-87692-263-0, BNF36200908), p. 121.
↑Gérard Michaux, « Une fondation tridentine : la congrégation bénédictine de Saint-Vanne », Revue d'histoire de l'Église de France, vol. 75, no 194, , p. 137–148 (ISSN0300-9505, DOI10.3406/rhef.1989.3461, lire en ligne, consulté le )
↑Archives départementales de Meurthe-et-Moselle, série H avant 1790 - H 103-162, inventaire et copie des titres, charts, titres de propriétés, procès (952-1790)
Voir aussi
Bibliographie
Victor Petitot-Bellavène, « La Société Philomathique et les débris de l'Abbaye de Saint-Vannes », Mémoires de la Société philomathique de Verdun, t. 11, , p. 367-379 (lire en ligne)
N. M. Petit, L’église de l’abbaye Saint-Vanne de Verdun, Verdun, Imprimerie Renvé-Lallement,
Hubert Dauphin, Le Bienheureux Richard : abbé de Saint-Vanne de Verdun (†1046), Paris, Louvain, coll. « Bibliothèque de la Revue d'histoire ecclésiastique » (no 24), , 420 p. (BNF32569709).
Gérard Michaux, « Une fondation tridentine : la congrégation bénédictine de Saint-Vanne », Revue d'histoire de l'Église de France, t. 75, no 194, , p. 137-148 (lire en ligne)
Pascal Arnoux, Abbayes et monastères : principaux ordres monastiques et religieux des origines au XXe siècle, Le Cannet, TSH, coll. « Les chronologies de Maurice Griffe » (no 39), (ISBN2-907854-42-9, BNF37087211).
Julien Maquet, « L'importance des revenus d'églises au XIIIe siècle. Le cas de Saint-Pierre à Liège et de Saint-Vanne à Verdun », Bulletin de la Commission royale d'Histoire, t. 165, nos 1-2, , p. 1-32 (lire en ligne)
Gaston et Monique Duchet-Suchaux, Les ordres religieux, Paris, Flammarion, coll. « Tout l'art. Histoire », (réimpr. 2006), 318 p. (ISBN2-08-012297-5, BNF37216013).
Valérie Serdon (sous la direction de), « Saint-Vanne de Verdun : restitution d'une abbaye », Bulletin monumental, t. 181, no 4, , p. 291-370 (ISBN978-2-36919-203-9) :
« Introduction », p. 293-295,
Valérie Serdon, « Partie I. L'abbaye aux prises avec la citadelle », p. 296-307,
Valérie Serdon, Jacques Guillaume, Arnaud Lefebvre, Isabelle Mangeot, Samuel Provost, « Partie II. Les sources de la redécouverte de l'abbaye », p. 308-321,
Valérie Serdon, Jacques Guillaume, Arnaud Lefebvre, Isabelle Mangeot, Pierre Sesmat, « Partie III. Saint-Vanne au cours des siècles : restitutions architecturales », p. 322-349,