Le père de Victor Prosper Considerant, Jean-Baptiste, est professeur de rhétorique au collège de Salins. Victor est le cousin de l'avocat et historien belge Nestor Considérant, journaliste au quotidien L'Indépendance belge où il a couvert la politique intérieure belge.
Victor est l'élève de son père au collège de Salins. Bachelier à 16 ans, il part préparer le concours d'entrée à l'École polytechnique au lycée de Besançon en 1824[5]. Il y est initié au fouriérisme par sa correspondante Clarisse Vigoureux, qui y avait été elle-même initiée par Just Muiron.
À Metz, Victor Considerant propage les idées du maître parmi ses camarades officiers[5] après avoir publié un article sur Fourier dans le Mercure de France en 1830, et, dans la Revue des Deux Mondes en , une nouvelle, Un pressentiment, inspirée par la mort de la fille de Clarisse Vigoureux (1789-1865), née Clarisse Gauthier[7] (et sœur de Joseph, beau-père de François Coignet), Claire (1809-1828), son amour de jeunesse. Il participe en 1832 à la fondation du journal Le Phalanstère qu'il dirige avec Jules Lechevalier et à la tentative de colonie sociétaire de Vesgre. Il quitte l'armée en 1833 et collabore à des journaux, notamment La Réforme industrielle[5], nouveau nom du Phalanstère et dont la parution cesse en 1834. La même année, il publie Destinée sociale et, en 1836, fonde un nouveau journal, La Phalange, puis la Librairie phalanstérienne[5]. En 1837, il succède à Fourier à la direction de l’École sociétaire[5] et, en 1838, il épouse Julie (1812-1880), seconde fille de Clarisse Vigoureux, fouriériste convaincue comme sa mère, et dont la dot permettra à son mari d'entrer en politique et de financer ses campagnes électorales ; Julie et Victor n'ont pas eu d'enfants.
Battu aux élections législatives en 1839 à Montbéliard et à Colmar, il est élu, en 1843, conseiller général de la Seine, et, la même année il fonde La Démocratie pacifique, d'inspiration monarchique[5] qui va connaître un grand succès.
Au moment de la restauration de la république en 1848, il est élu député de Montargis. Il siège à l'extrême-gauche et précise la notion de droit au travail qui devient une des idées fortes des socialistes français de 1848. En , il est le seul député à proposer le droit de vote pour les femmes[5].
L’année 2008 a été choisie par le ministère français de la Culture comme étant « l’année Victor Considerant », afin de célébrer le bicentenaire de sa naissance. De nombreuses animations ont notamment été présentées dans sa ville natale.
Une rue porte son nom, associé à celui de sa femme Julie à partir de 2022, à Besançon[9].
Critiques et controverses
Au sujet de Victor Considerant
La doctrine de Victor Considerant a été critiquée par l'un de ses contemporains, l'économiste libéral Frédéric Bastiat, dans une brochure intitulée Propriété et spoliation où il s'attaque en particulier à ce qu'il juge être son erreur, le concept de rente foncière sur laquelle Considerant s'appuie pour justifier le droit au travail. Erreur que, selon Bastiat, l'on trouve chez de nombreux économistes (John Ramsay McCulloch, David Ricardo, George Poulett Scrope, Nassau William Senior...) et qui était réfutée également par Henry Charles Carey. Bastiat prend également Victor Considerant à partie dans son pamphlet intitulé La Loi.
Au sujet du Manifeste du parti communiste
Dans son livre Le Complot de la réserve fédérale, le professeur d'université américain Antony Cyril Sutton accuse le philosophe Karl Marx d'avoir, pour la rédaction de son manifeste, fortement plagié l'ouvrage de Victor Considerant, Principe du socialisme ; Manifeste de ladémocratie au XIXe siècle, publié en 1843.
Le même accusation a d'abord été prononcée par W. Tcherkessof dans son ouvrage Pages of Socialist History en 1902. L'historien Alexandre Skirda a sorti un livre en 2019 intitulé Un plagiat "scientifique" : le copié collé de Karl Marx regroupant toutes les sources qu'a utilisé Karl Marx pour son manifeste.
Publications (par ordre chronologique)
« Un pressentiment », dans Revue des deux mondes, 1831, t. 4, p. 206-214.
Destinée sociale, Paris, Libraires du Palais-Royal, Bureau de La Phalange, 1834, 2 vol., vii-558 p. et lxxxvi-351 p.
Considérations sociales sur l'architectonique, Paris, Libraires du Palais Royal, 1834, xlix-84 p.
« De la question politique et en particulier des abus de la politique actuelle », dans Débâcle de la politique en France, Paris, Bureau de la Phalange, 1836.
Publication complète des « Nouvelles découvertes » de sir John Herschel dans le ciel austral et dans la lune traduit de l'anglais, Paris, Masson et Duprey, 1836, 162 p. (réédition et commentaire par V. Considerant et Raymond Brucker d’une brochure, publiée anonymement en qui était la traduction du Great Moon Hoax, canular publié en août et septembre 1835 dans le New York Sun par l’Américain Richard Adam Locke, selon lequel le célèbre astronome Herschel eût découvert des habitants dans la Lune).
Déraison et dangers de l'engouement pour les chemins en fer. Avis à l’opinion et aux capitaux, Paris, La Phalange, Ducor, 1838, 93 p.
« La Paix ou la guerre. À la France et au corps électoral », dans La Phalange, , publication en brochure, Paris, Bureau de "La Phalange", 1839, 45 p.
« De la propriété », dans La Phalange, , brochure publiée à Besançon, impr. L. de Sainte-Agathe, 1839, 16 p.
Bases de la politique positive. Manifeste de l’École sociétaire fondée par Fourier, Paris, Bureaux de la Phalange, 1842, 218 p.
Manifeste de la démocratie au XIXe siècle, 1843. Réédité en 1973 dans Les Cahiers du futur, no 1, Champ libre.
De la politique nouvelle convenant aux intérêts actuels de la société et de ses conditions de développement par la publicité, Paris, Bureaux de "La Phalange", 1843, 2e éd., 36 p.
Petit cours de politique et d'économie sociale à l'usage des ignorants et des savants, Paris, La Librairie sociétaire, 1844, 2e éd., 52 p.
Théorie de l’éducation naturelle et attrayante, dédiée aux mères, Paris, Librairie de l’École sociétaire, 1844, xvi, 194 p.
Principes du socialisme. Manifeste de la démocratie au XIXe siècle... ; suivi du Procès de la démocratie pacifique, Paris, Librairie phalanstérienne, 1847, IV-157 p.
Le Socialisme devant le vieux monde ou le vivant devant les morts, Paris, Librairie phalanstérienne, 1848, VII-264 p.
Théorie du droit de propriété et du droit au travail, Paris, Librairie phalanstérienne, 1848.
De l’instruction gratuite et obligatoire, Bruxelles, Leipzig, A. Schnée, 1858, 56 p.
Mexique : quatre lettres au maréchal Bazaine (sous anonymat), Bruxelles, Leipzig, Gand, C. Muquardt, 1868, 227 p. (à lire sur Gallica).
Prédictions sur la guerre. La France imposant la paix à l’Europe, Paris, A. Le Chevalier, 1870, 4 p.
La Paix en 24 heures dictée par Paris à Versailles. Adresse aux Parisiens, Paris, impr. Dubuisson, 1871.
Bibliographie
Les papiers personnels de Victor Considerant et de Charles Fourier, fondateur de l'École sociétaire, sont conservés aux Archives nationales sous la cote 10AS[10].
Jonathan Beecher (trad. de l'anglais), Victor Considerant : Grandeur et décadence du socialisme romantique [« Victor Considerant and the Rise and Fall of French Romantic Socialism »], Dijon, Les Presses du Réel, coll. « L’écart absolu », , 640 p., 24 cm (ISBN978-2-84066-344-7).
Louis Bertrand, Histoire de la démocratie et du socialisme en Belgique depuis 1830, Bruxelles, éd. Dechenne, 1906.
Maurice Dommanget, Victor Considérant, Paris, Éditions sociales internationales, 1929.
↑« … il n’y a pas d'accent aigu sur mon e. J'ai lutté vainement plus de soixante ans depuis que mon nom s'imprime pour l'en défendre ! » Voir Louis Bertrand, Histoire de la démocratie et du socialisme en Belgique depuis 1830, Bruxelles, éd. Dechenne, t. 1, p. 28, 1906.
↑Guillaume de Tournemire, « Victor CONSIDERANT », sur le site de généalogie Geneanet (consulté le ).