Représentation (psychanalyse)Représentation (allemand : Vorstellung), terme d'origine philosophique et psychologique, désigne en psychanalyse l'une des deux expressions de la pulsion, l'autre étant l'affect, que Freud lui oppose. DéfinitionSelon Jean Laplanche et Jean-Bertrand Pontalis, Sigmund Freud recourt au terme Vorstellung, qui relève du vocabulaire classique de la philosophie allemande, sans en modifier au départ l'acception : il s'agit de « désigner “ce que l'on se représente, ce qui forme le contenu d'un acte de pensée” et “en particulier la reproduction d'une perception antérieure” » (d'après Lalande cité par les auteurs du Vocabulaire de la psychanalyse)[1]. Mais Freud va en faire un usage original : il « oppose la représentation à l'affect »[1] ; représentation et affect vont devenir en métapsychologie freudienne les « deux expressions (ou “traductions”) de la pulsion »[2]. En fonction de « ce sur quoi porte le refoulement », le sens philosophique de « représentation » se trouve modifié par Freud « du simple fait de l'hypothèse de l'inconscient »[3]. VorstellungEn allemand, Vorstellung est un mot de la langue courante qui signifie littéralement « ce qui est placé devant, avant, au premier plan »[2]. Toutefois, explique Roger Perron, le sens que lui prête Freud est bien différent, dans la mesure où il peut s'agir « d'une seconde présentation » : « représentation » indique alors, au sens A, « une évocation consciente ou préconsciente dans l'espace psychique interne d'un objet ou d'une personne, voire d'un événement appartenant au monde extérieur », tandis qu'au sens B, moins évident, « représentation » désigne « l'une des deux expressions (ou “traductions”) de la pulsion au niveau des processus psychiques, l'autre étant le “quantum”, ou charge, d'affect »[2]. Dans la métapsychologie freudienne, l'« apport fondamental » aura été d'articuler le sens A, classique en philosophie et en psychologie, « avec le sens B, qui est propre à la psychanalyse »[2]. Autres mots de Freud en allemand, traduits par « représentation » en français
Histoire de la notionRoger Perron considère qu'avant même la création de la psychanalyse proprement dite, la notion de « représentation » intéresse déjà Freud dès sa Contribution à la conception des aphasies (1891), où l'on pourrait voir dans cet intérêt « l'origine de la distinction qu'il instaurera en 1915 entre « représentation de chose » et « représentation de mot » »[6]. Pour la « représentation de chose », on rencontre le terme d' Objektvorstellung dans Sur la conception des aphasies. Étude critique (1891), et le terme de Dingvorstellung dans L'Interprétation du rêve (1900)[7]. Quant aux « représentations de mot », elles sont introduites, selon Laplanche et Pontalis, « dans une conception qui lie la verbalisation et la prise de conscience » dès le Projet de psychologie scientifique (1895), où il est indiqué que « l'image mnésique peut acquérir l'« indice de qualité » spécifique de la conscience »[7]: cette idée jugée « capitale » par les deux auteurs, permet de « comprendre le passage du processus primaire au processus secondaire, de l'identité de perception à l'identité de la pensée »[7]. Dans ses premières formulations concernant les psychonévroses, Freud montre comment « tendent à être rejetées les « idées [représentations] inconciliables » avec la morale », et c'est lorsqu'« il en vient à désigner ce rejet comme « refoulement » », souligne Perron, que naît vraiment la psychanalyse[6]. Une distinction s'établit à cette étape de la pensée de Freud entre le « quantum d'affect » et la représentation; affect et représentation ont « un destin différent »[1]. L'affect est « converti en énergie somatique, formant ainsi le symptôme », et « c'est la représentation qui est à proprement parler refoulée » et « s'inscrit dans l'inconscient sous forme de trace mnésique »[3]. Dans l'hystérie, le quantum d'affect ayant été converti en énergie somatique, « la représentation refoulée est symbolisée par une zone ou une activité corporelles »[1]. Dans la névrose obsessionnelle, « le quantum d'affect est déplacé de la représentation pathogène liée à l'événement traumatisant sur une autre représentation, tenue par le sujet pour insignifiante »[1]. Si « l'idée de représentation de chose est présente très tôt dans la doctrine avec le terme, très voisin, de « traces mnésiques » », l'une des définitions les plus précises se trouve toutefois, d'après Laplanche et Pontalis, dans l'essai métapsychologique L'inconscient (1915) : « La représentation de chose consiste en un investissement, sinon d'images mnésiques directes de la chose, du moins en celui de traces mnésiques plus éloignées, dérivées de celles-ci »[7]. La valeur topique de l'association de l'image verbale à l'image mnésique, permettant la prise de conscience, se trouve renforcée dans L'inconscient, confirment Laplanche et Pontalis en citant Freud : « La représentation consciente englobe la représentation de chose plus la représentation de mot correspondante, tandis que la représentation inconsciente est la représentation de chose seule »[7]. Toujours selon les mêmes auteurs, c'est aussi et surtout dans les textes métapsychologiques de 1915, Le refoulement (Die Verdrängung) et L'inconscient (Das Unbewusste), que la notion de « Représentant-représentation » est définie, en même temps qu'apparaît clairement dans ces textes « la théorie la plus complète que Freud ait donnée du refoulement »[4]. Notes et références
Voir aussiBibliographieTextes de référence
Études sur le concept de représentation
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