Barrias séjourne à l'Académie de France à Rome et « devient à son retour en France l'un des plus brillants espoirs de l'École française de sculpture »[1] : si, constate Françoise Cachin, « Paul Dubois, Henri Chapu et Alexandre Falguière constitue le noyau de ce que l'on appelle les néo-florentins », Louis-Ernest Barrias figure bien parmi ceux qui, à leur suite, « se convainquirent que le XVe siècle n'est pas aussi gothique qu'on a voulu le dire et que les Donatello, les Andrea del Verrocchio, les Mino da Fiesole, les Bernardo Rossellino et autres barbares ont vu assez clair dans l'âme humaine : à la suite de cette découverte inattendue, une évolution s'est faite dans l'idéal. La sculpture redevint vivante »[3].
C'est dans ce contexte que l'on observe que Le serment de Spartacus de Barrias « offre, dans le corps du supplicié, un écho de la Mise au tombeau de Michel-Ange au Duomo de Florence »[3]. Il produit par la suite de nombreuses œuvres sculptées, la plupart en marbre. En 1881, il est récompensé par une médaille d'honneur des beaux-arts et nommé chevalier de la Légion d'honneur en 1878, puis promu officier en 1881 et commandeur en 1900. L'artiste remplace Auguste Dumont à l'Institut en 1884, puis succède à Jules Cavelier comme professeur aux Beaux-Arts de Paris, où, parmi ses élèves les plus notables, on compte Victor Ségoffin, Charles Despiau et Paul Landowski.
Il a eu trois enfants : Paul (1875-1973), qui deviendra un architecte réputé, lauréat du 2e second grand prix de Rome en 1901[4]; Daniel (1883-1969), qui embrassera la carrière militaire[5], et Madeleine (1877-1925).
Monument à Victor Hugo, haut-relief en plâtre. Hugo entouré des personnages de ses romans : Esmeralda, Quasimodo, Cosette, Gavroche , Jean Valjean , les Travailleurs de la Mer, 131 × 203 cm, no inv. 1904.9.1[38];
Monument à Victor Hugo : la nuit du 4, haut-relief en plâtre. Hugo appelant à la résistance au coup d'État de Louis-Napoléon le , 133 × 206 cm, no inv. 1904.8.1[38].
jardin des Tuileries, près du grand bassin rond : Le Serment de Spartacus, 1869, groupe en marbre d'après un plâtre réalisé à la villa Médicis, installé en 1875.
Les Nubiens ou Les Chasseurs d'alligators, 1894, haut relief en plâtre[56].
La Nature se dévoilant à la Science, 1899, marbre, onyx, granit, malachite, lapis-lazuli. Cette première version fut commandée en 1889 pour orner la nouvelle façade de la faculté de médecine de Bordeaux. Des réductions de l'œuvre ont été éditées par la fonderie Susse[57].
La Maçonnerie et la Serrurerie, vers 1872, haut-relief plâtre, esquisse pour le fronton d'un dessus de porte de l'avant-foyer de l'opéra Garnier de Paris[59];
« Pour la ville d'Épernay désireuse d'honorer la mémoire du fondateur de ses hospices (Victor Auban, 1832-1896, n.d.l.r.), Barrias a sculpté Le Refuge : c'est une pauvre fille lasse et défaillante, affaissée plus encore qu'assise sur un banc hospitalier au-dessus duquel se dresse le buste du philanthrope, donateur de l'asile qui va la recevoir. Cette figure est fort touchante en sa grâce douloureuse. J'aurais préféré, pour ma part, que le bienfaiteur, modeste jusqu'au sacrifice, s'effaçât complètement et allégeât le monument du buste qui le couronne. À la section des "arts décoratifs", on peut se donner le plaisir de revoir dans une jolie réduction le chef-d'œuvre de Barrias, cette Fille de Bou Saâda, accroupie et jetant d'un geste triste et affectueux des fleurs sur le tombeau du peintre Gustave Guillaumet. » - André Michel[86]
« Au lendemain de la proclamation de la IIIe République, un nouveau style républicain, laïque et patriotique, surgit du macadam. Essentiellement bourgeois et toujours rétrograde, chargé de lourds symboles, il se veut le héraut du progrès. Ce style, où l'emphase le dispute à la naïveté, n'est pas dépourvu d'intérêt et il n'est pas exclu que, dans un avenir assez proche, on rende justice au talent de Barrias ou de Chapu. Certaines de leurs sculptures telles L'Électricité ou La Vapeur sont remarquables par le génie qu'ils eurent - mêlant les symboles aux appareils techniques - de réaliser des œuvres d'une originalité aussi belle sur le plan plastique que singulière par la composition. » - Maurice Rheims[8].
« If Barrias intended to elevate the new energy force (L'Électricité) - to endow it with a "rightness" in the cosmos - the allegory he presents is not completely intelligible. As in many sculptures of the period, a seriously intended subject was treated with such a high degree of sensualism that the result was wonderfully ludicrous. He demonstrates the dilemn of academic artists ettempting to cope with modern technology in a traditional, outmoded vocabulary of visual expression. » - Marie Busco et Peter Fusco[87]
« La Défense de Paris et La Défense de Saint-Quentin, tous deux signées Barrias, sont des émanations d'un même fond idéologique ; mais, en réalité, leur ressemblance est bien plus le résultat d'une rivalité personnelle. Edmond Turquet, sous-secrétaire aux Beaux-Arts, a voulu s'approprier l'idée d'un grand monument à la mémoire de la Défense nationale tel que celui envisagé par le nouveau préfet de la SeineFerdinand Hérold. Tous deux étaient de jeunes avocats ambitieux, gravitant dans l'orbite de Jules Ferry, et tous deux avaient pouvoir de décision sur les fonds attribués aux arts par le gouvernement. Bien que sincèrement attachés à la République, ils n'avaient aucun plaisir à voir leur propre mérite diminué par l'action d'éclat d'un rival. Turquet profita de son amitié avec Barrias, ainsi que de ressources financières plus conséquentes de l'État, pour s'assurer pour s'assurer que lorsque La Défense de Saint-Quentin serait inaugurée en 1881, elle précéderait de deux ans celle de La Défense de Paris. » - June Hargrove[88]
« Durant son séjour en Italie, le jeune Barrias, désireux de sortir des lisières de l'école, renouvelle la tradition classique par une étude plus attentive de la réalité puis, à la suite de Carpeaux et Dubois, trouve dans l'art de la Renaissance le moyen de son émancipation de la seule influence antique. L'art de Michel-Ange participe bientôt dans son œuvre à la constitution d'une sculpture expressive où s'entremêlent les références à l'art ancien et une volonté nouvelle de réalisme, et dont Les premières funérailles sont un parfait exemple. » - Camille Osersanz[1]
Raoul Verlet, entre 1886 et 1887, second prix de Rome en 1887.
Notes et références
↑ abc et d Camille Osersanz, Louis-Ernest Barrias (1841-1905) - Un sculpteur sous la IIIe République, thès de doctorat, Université Paris-Sorbonne, 2 juillet 2014.
↑ a et b Sous la direction de Françoise Cachin, « Les néo-florentins : Michel-Ange et la Renaissance », L'art du XIXe siècle - Seconde moitié, Éditions Citadelles – Edito, 1990, pp. 205-206.
↑André Michel, « La sculpture décorative aux Salons », Art & Décoration, tome VI, juin-, pp. 33-41.
↑Marie Busco et Peter Fusco, « Louis-Ernest Barrias », The Romantics to Rodin - French nineteenth century sculpture from North America collections, Peter Fusco & H.W. Janson éditeurs, New York et Los Angeles, 1980.
↑June Hargrove, « Les monuments de la guerre de 1870-1871 », La République en représentations autour de l'œuvre de Maurice Aguilhon, études réunies par Maurice Agulhon, Annette Becker et Évelyne Cohen, Publications de la Sorbonne, 2006.
Discours prononcés par André-Joseph Allar et Julien Guadet sur la tombe d'Ernest Barrias à l'inauguration de son buste par André-Joseph Allar le , Paris, s.i., 1906.
Daniel Cady Eaton, A Handbook of Modern French Sculpture, Dodd, Mead & Co, New York, 1913.
Stanislas Lami, Dictionnaire des sculpteurs de l'École française au XIXe siècle, tome premier, Librairie ancienne Honoré Champion, 1919 (lire en ligne).
Maurice Rheims, La sculpture au XIXe siècle, Arts et métiers graphiques, Paris, 1972.
Marie Busco et Peter Fusco, The Romantics to Rodin, French nineteenth century sculpture from North America collections, Peter Fusco & H.W. Janson éditeurs, New York et Los Angeles, 1980.
Christine Debrie, « Le musée Antoine-Lécuyer de' Saint-Quentin : une sculpture de Louis-Ernest Barrias », La Revue du Louvre, no 1, 1981, pp. 53-62.
Sous la direction de Georges Weill, La perspective de la Défense dans l'art et l'histoire, Archives départementales des Hauts-de-Seine, Paris, 1983.
June Hargrove, Les statues de Paris, Albin Michel, 1989.
Sous la direction de Françoise Cachin, L'art du XIXe siècle - Seconde moitié, 1850-1905, Éditions Citadelles – Edito, Paris, 1990.
Anne Pingeot, La sculpture au musée d'Orsay, Éditions Scala / Réunion des musées nationaux, 1995.
Andreas Blühm, The colour of sculpture, 1840-1910, Van Gogh Museum, Amsterdam, 1996.
Georges Poisson, Le sort des statues de bronze parisiennes sous l'occupation allemande, 1940-1944, mémoires publiés par la Fédération des sociétés historiques et archéologiques de Paris et de l'Île-de-France, tome 47, 1996.
Emmanuel Bénézit, Dictionnaire des peintres, sculpteurs, dessinateurs et graveurs, vol.1, Gründ, 1999.
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Guillaume Peigné, Dictionnaire des sculpteurs néo-baroques français (1870-1914), Paris, CTHS, coll. « Format » (no 71), , 559 p. (ISBN978-2-7355-0780-1), p. 69-78.
Caterina Y. Pierre, « Louis-Ernest Barrias and modern allegories of technology », Nineteenth Century Art Worldwide 11, no 2, été 2012 (consulter en ligne).
Camille Osersanz, Louis-Ernest Barrias (1841-1905) - Un sculpteur sous la IIIe République, thèse de doctorat sous la direction de Barthélemy Lobert, Université Paris-Sorbonne, 2 juillet 2014 (consulter en ligne).